2009 CLAP DE FIN
SOUVENIRS – PLAISIRS – REGRETS – FAMILLES –
ET MAINTENANT
Le destin est ce que la vie fait de nos désirs. Vous voilà révélé de mon intime : harmonie entre une passion qui me taraude “Le théâtre” et l’exercice avec professionnalisme du métier de « Artisan ». Ma vie professionnelle, ma vie culturelle, ma nourriture du corps et ma nourriture de l’esprit…
De ma première réalisation importante en 1988 à aujourd’hui, tiraillé de doutes, je me suis chaque fois demandé si tout cela valait la peine d’être, face au sacrifice que cette passion engendrait : Abstraction de moi-même, enfermé dans de perpétuelles cogitations, créant une disponibilité totale qui faisant fi de ma famille et de mes amis. Je ne voyageais que dans ma tête, il n’a jamais été question de partir ailleurs que dans l’univers de Shakespeare …
– On dit que le temps va et vient, allume, efface grossit diminue… amplifie, ramifie… De familières, voire très intimes, certaines relations sont devenues étrangères.. oubli ou souvenir !
(Georges Sand) ‘Le souvenir est le parfum de l’âme”
Chaque création rassemble un nombre important d’hommes, de femmes et d’enfants de tous âges et de toutes conditions. Le groupe constitué, au fil des jours, des mois, d’un travail théâtral jusqu’aux moments des représentations, se rencontre, s’apprivoise et se découvre. Il entre en connivence dans une intimité complice que je ne vois rarement s’accomplir ailleurs que dans l’aventure théâtrale. Pour exemple, il devient vite spontané et naturel, cela peut sembler bien curieux de l’extérieur, de voir les membres de ces équipes, se donner des accolades aux retrouvailles ; généralement dans notre vie et nos coutumes, n’est-ce pas seulement réservé à nos proches familiers ? Dans l’acte créatif du théâtre vivant, l’équipe se construit une bulle dans laquelle inextricablement il se créé une (illusoire) famille !
Une année, plusieurs peut-être et c’est la fin d’un projet, une séparation presque toujours heureuse dans l’enthousiasme de la réussite et d’un bonheur partagé qui se prolonge et s’éteint parfois de nostalgie, rarement de douleur et aussi, d’oubli. Combien ai-je vu de comédiens et comédiennes pleurer le soir d’une dernière ou les jours qui suivent l’aventure achevée… On se quitte, on s’extrait d’un personnage, d’un rêve, d’une filiation! … Et puis, le temps passe.. chacun va où la vie l’emmène… quelquefois avec le théâtre, la danse, le chant, les techniques… Les pages se tournent naturellement, inexorablement… Alors, il reste c’est sûr, le beau souvenir, celui qui longtemps après peut encore nourrir notre mémoire mais il peut aussi être enfoui dans le total oubli…
(Victor Hugo) “Le souvenir, c’est la présence invisible”
(Charles Nodier) “On ne recommence plus, mais se souvenir, c’est presque recommencer »
Je revendique être le père de tous ces projets et de ces familles qui se dissolvent avec le temps. Que l’on ne me demande pas lequel ou laquelle je choisirais en priorité, je les ai tous aimés.
La notion de plaisir ! Faire prendre conscience à une équipe des nécessités de l’effort, du travail, de l’engagement, c’est de ma responsabilité. Je dois guider chacun avec discernement à se dépasser, à s’investir, à travailler sa mémoire, son jeu, son corps, sa diction, sa sensibilité, ses réflexes… j’oubliais, sa présence !
Dans mon travail de metteur en scène, on me reproche (parfois) d’être sévère, rigoureux, exigeant, intransigeant et même “pas trop marrant”. Je comprends que ces qualificatifs me soient un jour ou l’autre attribués ! J’ai toujours revendiqué la valeur du théâtre amateur, la nécessité de sa réussite, la responsabilité de porter haut et fort avec fierté les œuvres théâtrales, tout cela je l’ai payé au prix fort, celui d’être constamment confronté à la dualité plaisir-exigence… Chez l’amateur, ce qui prime généralement, presque avant tout, c’est la notion de plaisir partagé dans la pratique théâtrale, beaucoup s’appuient essentiellement sur ce désir. C’est « une pierre d’achoppement » dans presque tous les groupes amateurs, sans compter de contrer ceux qui (des professionnels ) auraient tendance à dire « c’est bon, ce sont des amateurs ! »Je porte la responsabilité de la cohérence du groupe ainsi formé.
Ce type de projet souvent dans l’itinérance est défini par des règles qui gèrent les rencontres multiples sur les terrains. Elles sont exigeantes pour ceux qui nous accueillent, nous avons en retour l’obligation d’assumer les nôtres qui me font endosser quand je peux, avec souplesse et adresse le rôle de chef ! Et puis, ces projets ont la chance de recevoir les soutiens financiers des pouvoirs publics et administratifs, locaux et privés. Ces aides, permettent les accompagnements et encadrements professionnels nécessaires de l’artistique et des techniques. Pour chaque création, les médias entretiennent une pression à laquelle je ne peux échapper.
Je me dois d’agir avec efficacité auprès de tous pour un vrai travail abouti de qualité..
Plus le nombre de comédiens engagés est important, plus ma maîtrise, ma diplomatie sont mises à l’épreuve. Ma solitude est grande lorsque je suis conduit de rappeler à l’ordre quand-il le faut les règles, à astreindre à un travail plus sérieux ou à empêcher des dérives et débordements. Je gère malaisément cette responsabilité de metteur en scène qui me fait parfois jouer le rôle ingrat du père fouettard.
Regrets :
Bémol à mon enthousiasme épistolaire : « Mea culpa » lorsque je réclamais un travail précis des plus attentifs, je mettais inévitablement certains comédiens sous pression. Concentré et probablement stressé moi-même, je ne percevais pas forcément toujours la portée de mes exigences qui devait être parfois empreintes de manque de diplomatie et d’adresse ! Dans la succession des projets sur ces trente années passées, je garde présent en mémoire quelques rares moments intempestifs où j’ai perdu mon sang-froid ! Je voudrais pouvoir effacer ces débordements qui ont engendré ou bouderies, brouilles, brisures, mésententes, quiproquos, zizanies… ruptures !
Et la famille du théâtre avec les conjoints et conjointes des participants comédiens ou de la logistique ou des techniques ?
Comme je vous l’ai expliqué, chaque création engendrait une bulle familiale ! Cet état de fait était-il conciliable avec les conjoints, conjointes, enfants et environnements proches de l’équipe de création ?
Il y avait les conjoints, conjointes et ami(e)s qui trouvaient leur place dans ces projets, se joignant aux équipes de décors, de logistiques ou techniques… Ils partageaient alors notre pratique artistique, nos inquiétudes, nos plaisirs, joies et bonheurs avec leurs enfants quel que soit l’âge souvent présents sur les gradins ou dans les salles de répétition, s’amusant entre eux ou dormant sous une couverture… ou dans le couffin. Quelques fois timidement mais efficacement et avec bonheur, ils se joignaient à la comédie…
D’autres, conjoints, conjointes ou ami(e)s étaient totalement indifférents à l’activité de leur proche. Ils seront seulement spectateurs d’un soir ou, même pas !!! Imaginez alors la difficulté à vivre de ces couples ! Il n’est pas rare alors de voir le comédien ou la comédienne culpabiliser ! Le regard d’un proche entourage, s’il peut être enthousiaste et admiratif, peut alors parfois se révéler d’une insidieuse défiance, voire indifférence, mépris ou moquerie !!!
Me concernant, je puis témoigner que lorsque je partageais ma vie culturelle et professionnelle et que je m’engageais dans une de ces grandes créations, mes clients (Artisan, je vivais en construisant des maisons) pour beaucoup n’acceptaient pas que leur maître d’oeuvre soit aspiré dans son loisir de théâtreux ! “Ce n’était pas sérieux et crédible.” Je sais qu’à ces moments là, plus je faisais parler de moi, plus mon entourage, mon personnel et mes clients étaient exigeants, comme pour me rappeler quelle était alors ma priorité.
ET MAINTENANT ! De la plus lointaine rencontre à la plus récente, il m’a fallu retrouver mon histoire pour mesurer la multitude de rencontres et le souvenir précis que je garde de chacun de vous.
(Anne Kleepstheil.) “Le théâtre est une aventure humaine qui exacerbe les sentiments, le bon, le meilleur, mais aussi le désagréable. De nos jours, il est difficile de faire en sorte que nous investissions de façon gratuite, notre temps, notre énergie, nos week-ends, notre confort, au service d’un rêve, au service d’un moment de « luxe, de calme de beauté »
Dans ce monde de profusion et de consommation que vous reste t-il à vivre si ce n’est des aventures. Des aventures hors du commun, parce que confiants et généreux, vous devez vous surpasser, accomplir vos délires, parce qu’il serait dommageable que ces moments exceptionnels de rencontres vous échappent et s’effritent avec le temps… Et, il nous reste tant à faire encore… Merci à tous, qui avez un jour ou d’autres été présents…
Voilà, je ferme ici par ces lignes le chapitre qui correspond à ce qui m’a fait vivre dans le théâtre avec vous. Je retournerai de temps à autres consulter ces mots de mémoire, espérant y retrouver quelques traces de vous, soit dans un commentaire ajouté, une anecdote oubliée, un souvenir retracé, un hommage ou rappel ou la correction d’événement…
“Tout en haut de la grande montée, il y a une autre vallée. Tout au bout, tout au bout de la vie il y a encore de la vie…”
… de mes mains j’ai construit des murs… de ma tête j’ai construit des rêves… de mes mains et de ma tête, je construis des sculptures…
De mon travail de sculptures, un site en construction sera révélé en 2015.
bonjour, en effet de belles rencontres durant ces années de théâtre!!
Le goût du théâtre ,du jeu ,je l’ai toujours (sans jouer des pièces faute de temps) mais en jouant en classe, en famille ( petites saynètes pour les amis) ou lors du printemps des poètes au collège!! je prends beaucoup de plaisir et observe que nos enfants Paul , Emma et Héloïse aiment investir des rôles eux aussi!!
bises.
Elisabeth
Pour ceux qui ne connaissent pas Elisabeth, je voudrais souligner qu’avec Jean Marc, ils forment un magnifique couple.
Pour ce qui est de leur vraie histoire commune, ils se sont rencontrés sur :
Ah Dieu que la guerre est Jolie 1 et 2 à Usson du Poitou et en Itinérance
Le théâtre Ambulant Chopalovitch en Itinérance
Le Cercle de Craie Caucasien 1 et 2 à Usson du Poitou et en Itinérance.
Et puis, comme le dit la fin du conte : Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants, Paul, Emma et Héloïse.
On ne recommence plus, mais se souvenir, c’est presque recommencer.
Mais même si sans doute ce serait très très compliqué, qu’est ce que j’aimerai recommencer!!!!
Merci Jean Marie.
JP M
Pour ceux qui ne connaissent pas Jean Pierre, le comédien de ces années d’aventures là, qui voudrait recommencer… Sachez que pour un recommencement, c’est un recommencement ! Voilà qu’il est devenu Maire de la commune de L’Isle Jourdain…
Jean Pierre, mais vraiment avec cette haute distinction pour laquelle je te félicite, ce ne serait pas très très sérieux ! De te faire refaire toutes les cabrioles à laquelle tu t’es prêté avec un talent et une fougue inégalable. Cependant le pouvoir est un peu près de toi aujourd’hui… Ah ! Ah ! Ah !
Très Cher Jean-Marie,
Le feu n’a pas tout emporté! les braises de celui, beaucoup plus beau que tu as allumé dans notre coeur sont encore vives. Si tu souffles, elles pourraient se ranimer. N’avons-nous pas conquis, avec Jean-Pierre ce que l’on nous croyait incapable de conquérir ?
La Part essentielle de ma vie s’est construite sur ces gradins, dans ces coulisses, dans ces nuits magiciennes. Le Destin qui fût souvent au centre de nombreuses de ces Aventures m’a frappé délicieusement dans ce Théâtre. Il nous reste de la Vie, soyons audacieux! Poseïdon replonge… moi aussi! Je t’embrasse.
Pour le lecteur, j’ajoute un indice, clé de lecture de ce très beau témoignage d’une épopée de vie dans notre Théâtre de Verdure à l’Antique Orchestra, theatron, skéné et parados…
C’était quelque part dans ces années de 87 à 95…
Jean-Hubert est soit : Jeune Ambassadeur, Damoiseaux, Batelier, puis lumineux Hélios ou Poséidon surgissant du Lac. En « deus ex machina », (qui signifie l’intervention soudaine d’un dieu dans l’action), il rencontre, Virginie la Fée « Fleur des Pois » ou Suivante de Iseult, puis Naïade et une Sirène qu’il enlève pour le théâtre d’une vie heureuse de famille avec leurs trois enfants… Qui peut nier que la réalité dépasse la fiction ?
zppr52